A moins de 8 mois des élections présidentielles du 25 février 2024, la Capitale du Rail tarde à connaître la grande effervescence politique d’antan, dans des moments similaires. Et pour cause, la classe politique locale adopte pour le moment une posture attentiste, liée au contexte politique actuel. Ce qui n’enlève en rien, les enjeux que porte ce scrutin dans cette ville traditionnellement bouillonnante sur le plan politique.
Ce cliché fait d’ailleurs qu’elle a toujours joué un rôle important dans les différentes alternances politiques survenues dans le pays. Ce qui est bien attesté par les évènements de 1988, qui sont partis de la Place de France aujourd’hui Promenade des Thiessois, un certain 25 février 1988 et qui se sont propagés partout dans le pays, avec des violences qui ont failli faire basculer le pouvoir socialiste d’alors.
Les enjeux restent pratiquement les mêmes pour ces élections de 2024, avec le besoin de changement exprimé par beaucoup de sénégalais et la non candidature du Président sortant. A Thiès, le Rewmi a déjà affiché son candidat en la personne du Président Idrissa Seck et au-delà de la victoire finale, le premier objectif est de retrouver son hégémonie, perdue lors des dernières élections locales puis législatives, dans le cadre de la grande coalition Benno Bokk Yaakaar. C’est dire qu’au-delà du fauteuil présidentiel, c’est l’avenir du parti qui est en jeu, car une nouvelle défaite dans la capitale du rail où il a régné en maître pendant près de 20 ans, compromettrait la carrière politique du Président Idrissa Seck et par ricochet le parti Rewmi.
Cheikh Tidjane Lô de Rewmi Thiès-Est, ex adjoint au Maire et Chef de Cabinet de Ministre sous son magistère au département des sports est convaincu qu’en réalité le parti du Président Idrissa Seck n’a pas perdu sa place dans le cœur des Thiessois. Et selon lui, le renoncement du Président Macky Sall à un autre mandat a induit une nouvelle donne politique. Il souligne que les retours dans les rangs, de responsables frustrés se comptent aujourd’hui à la pelle, sans compter les nouvelles adhésions.
Pendant ce temps les libéraux, aujourd’hui ragaillardis par la perspective d’une candidature de Karim Méissa Wade, fourbissent déjà leurs armes, pour redorer leur blason et retrouver la place perdue, sur l’échiquier politique local.
Pour Maguèye Sarr Secrétaire Général de la section communale du PDS de Thiès-Est et plénipotentiaire du parti pour les prochaines élections présidentielles, le PDS est aujourd’hui à la croisée des chemins, parce que frappé par de nombreuses difficultés, notamment la perte du pouvoir, le départ pour d’autres prairies de beaucoup de ses responsables, mais aussi l’inorganisation qui frappe les instances. Selon lui, des responsables sont indisciplinés et quelque part le parti est presque devenu une armée mexicaine, certains n’acceptant pas d’être dirigés par d’autres. C’est les raisons qui font à ses yeux, qu’il est quelque part relégué au second plan.
« Mais heureusement que Me Abdoulaye Wade est là, un homme charismatique, adoré et respecté et quand nous pensons à lui, nous avons encore de l’espoir » fait-il remarquer. Il affirme que les libéraux de Thiès en général, ont mesuré les fortes responsabilités dans ce contexte politique actuel, pour redorer le blason du parti dans la ville et le département. Il ajoute sur un ton d’espoir, « nous avons compris que c’est le temps des grandes batailles, pour repositionner le PDS à sa véritable place. Nous attendons avec fermeté et impatience, l’arrivée de notre candidat Karim Méissa Wade qui porte notre espoir et celui de tout le Sénégal » s’est-il exclamé. Dans ce sillage, il a demandé aux une et aux autres de se donner la main, pour transcender les divergences et dépassionner les positions actuelles, car dans beaucoup de sections, les responsables ne s’entendent pas et cela ne peut prospérer dans ce contexte stratégique de reconquête du pouvoir ».
EDOUARD LATOUFFE APR THIES-OUEST
« Gagner à Thiès, relèverait d’une gageure si…….«
La mouvance présidentielle quant à elle, reste dans l’expectative, pour n’avoir encore aucune idée du candidat qui portera ses couleurs, pour assurer la succession du Président Macky Sall. C’est pourquoi d’ailleurs, beaucoup de responsables préfèrent garder le silence pour le moment.
Edouard Latouffe responsable APR à Thiès Ouest est d’avis que c’est le « Mburrok Soow » qui a effacé la mouvance présidentielle dans l’espace d’exercice du pouvoir local et les riches enseignements tardent encore à être tirés.
« La candidature du Président Idrissa Seck constitue une nouvelle donne que nous devons désormais insérer dans notre agenda. L’enjeu électoral change avec cette candidature. L’APR ne pourra gagner à Thiès sans un rajeunissement de l’élite politique et sans une alternance dans la dévolution des responsabilités. La reconquête d’une nouvelle majorité à Thiès ne peut se réaliser qu’avec un repositionnement stratégique de l’élite politique dans l’espace d’exercice du pouvoir central. Si Thiès n’est pas renforcée en termes de responsabilité, si ses responsables sont exclus du schéma successoral, gagner relèverait d’une gageure. Le DG Abdoulaye Dièye peut certes être la solution. Son leadership est incontestable. Mais notre majorité doit parallèlement favoriser des leaderships pluriels éclatés forts dans la ville et dans l’espace du département de Thiès » a-t-il indiqué.
Pour lui, la position du Président Macky Sall sur le troisième mandat, plusieurs fois absente sur ses adresses à la nation avait laissé libre cours à toute forme d’interprétation. Mais à ses yeux, sa décision sage et opportune de renoncer à un troisième mandat, quoique conforme à la constitution, a été bien accueillie par toute la classe politique dans son entièreté.
« Notre parti, qui a exercé de façon ininterrompue le pouvoir pendant douze ans pourrait-il se passer du Président Macky Sall, pour relever le plus grand défi électoral de l’histoire politique du Sénégal ? Un parti politique qui a souffert d’une absence de structuration sera-t-il en mesure de proposer un schéma successoral qui le mènera à la victoire ? Qui parmi les candidats à la candidature aura le profil de présidentiable ? Le consensus sera-t-il de mise dans le choix de celui qui aura la redoutable tâche, après des échéances locales et législatives où notre coalition a été malmenée, d’inverser radicalement la tendance et d’empêcher une troisième alternance démocratique ? » s’est-il interrogé.
Il ajoute ensuite qu’en vérité, seul le Président Macky sall, qui dispose de suffisamment de grilles de lecture, d’éléments d’appréciation et de renseignements pourra proposer le candidat idéal. Lui seul pourrait trouver la meilleure formule, pour avoir une équipe de relève consensuelle et fédératrice des sensibilités à l’intérieur de L’APR. C’est dire qu’il reste l’unique maître du jeu et il doit tout faire pour que le bébé ne soit pas jeté avec l’eau du bain
Mbaye SAMB (L’AS)