L’homme d’État Ousmane TANOR DIENG
Nous avons l’honneur de parler du Président Ousmane Tanor Dieng en guise de contribution, quatre semaines après sa disparition douloureuse, qui a plongé le pays et la République dans une profonde tristesse. D’aucuns seront surpris d’une certaine prétention et d’un risque véritable à témoigner sur l’homme, tellement sa dimension politique et républicaine est large au point que nous ne pouvons nous situer qu’au crépuscule politique du Président TANOR au regard de la nouvelle génération politique que nous sommes.
Néanmoins, il nous est possible de parler et d’apprécier sur la base de nos origines fortement socialistes et nos modestes connaissances acquises dans le milieu. En effet, nous sommes issus d’un père fortement ancrée dans les valeurs du socialisme, reconnu et distingué dans le PS, après avoir tout donné à sa formation politique dont l’héritage est jalousement conservé par de grands socialistes dans mon chaleureux terroir de Ngoundiane.
Au-delà de son parcours professionnel emblématique, OTD s’est toujours distingué sa vie durant par son humilité et son sens élevé de la responsabilité étatique qui lui ont valu longévité et reconnaissance de la part de ses pairs et citoyens de son pays. Il est très rare de voir un homme politique de sa trempe, recevoir de témoignages aussi élogieux, particulièrement venant de ses adversaires politiques, tellement l’appréciation est unanime sur la nature républicaine de l’homme, modéré dans le langage, méthodique et humble dans les actes. Devant les attaques les plus virulentes, même de ses camarades de parti qui l’accusent d’avoir vendangé sa dignité et son parti pour des intérêts personnels, il a fait preuve d’une sérénité inébranlable, avec des convictions en bandoulière, dans le compagnonnage convaincu avec le Président Macky Sall, qui a été très touché par la disparition de OTD qui lui a consacré un hommage digne des grands hommes qui ont fait l’histoire de la République du Sénégal.
Ce vibrant hommage que la nation toute entière lui a rendu, est symbolique et emblématique d’une figure politique, qui a servi son pays avec loyauté et abnégation pendant 40 années et qui a su, au-delà de toutes les velléités, conserver les valeurs cardinales en souffrance dans le milieu politique d’aujourd’hui. La clémente position actuelle de jeunes trop critiques jadis à son encontre pour ses choix, devrait pousser plusieurs acteurs politiques à comprendre qu’il ne faut jamais insulter l’avenir, de par sa complexité et son incertitude, pour emprunter une leçon reçue du MDC Augustin TINE, qui entretenait d’excellentes relations avec le défunt.
Après l’accession du Président Wade au pouvoir en 2000, OTD a pu tenir les commandes du navire en dépit des velléités de transhumance et de toutes les tentations ayant embarqué plusieurs ténors socialistes, vers la galaxie libérale qui fut un monstre à tout bouffer sur son passage. Oui l’opposition est difficile et il faut avoir les ailes si solides pour nicher au bord de l’abîme et le Président Tanor a affronté avec courage et abnégation, les vicissitudes de la misère durant cette période féroce.
Même dans sa posture d’opposant au régime d’Abdoulaye Wade, OTD s’est toujours distingué à travers une opposition républicaine, avec des qualités dont nous sommes aujourd’hui nostalgiques, au regard de toutes les bêtises et les pratiques d’adversité qui frisent l’indignation et galvaudent l’image de l’homme politique.
OTD était l’incarnation du prototype du responsable politique achevé qui s’est abreuvé à la source du socialisme et de la sacralité républicaine chère au Président poète Senghor connu pour son éloquence, son élégance, sa pertinence et sa bonne mise même dans sa poésie qui remonte à son royaume d’enfance. Il a su garder jalousement l’héritage de Senghor contre vents et marrées. Au-delà de l’école socialiste, son passage à l’École nationale d’administration a beaucoup contribué à façonner sa personnalité. En effet, l’élite sortante de l’ENA se distingue singulièrement par son charisme, son sens élevé de la responsabilité, de la retenue, de l’humilité et de son esprit républicain qui lui vouent respect et admiration, de la part du peuple, contrairement à ce que nous commençons à observer de nos jours.
Notre génération qui est celle des réseaux sociaux et se singularise hélas négativement par l’injure, l’arrogance, l’indiscipline et la médiocrité, pour s’imposer dans le milieu qui n’est plus attractif. Nos institutions sont dilapidées, brimées, désacralisées par des pratiques délinquantes qui déchantent et obscurcissent l’horizon depassable de l’engagement politique. On accuse à tort, on insulte, on nous terrorise par une pensée unique, aux allures d’une révolution sans aucun fondement idéologique, dans les médias ou réseaux sociaux. C’est un coup de sommation si violent, porté contre notre dignité et notre honneur, qu’aucune méthode de blanchiment ne peut effacer. Car hélas, les réseaux sociaux sont devenus le lieu de la dépravation, de la déraison, de la naïveté, du fanatisme, du jugement prématuré, de la recherche du buz aux prix du mensonge, de la délation, de la manipulation, de la médiocrité et de la facilité. Point de réflexion ni de recul, tout ce qui se dit est vrai, peu importe l’auteur et les finalités, il faut juste croire et même partager sans penser aux conséquences.
Et toutes les grandes gueules devenues célèbres, ont fondé leur « métier » et leur influence négative sur cette méthode dégueulasse, qui n’honore pas ses auteurs. L’élégance du verbe qui charme et la sève nourricière qui confère de la valeur à la personnalité ont quitté le milieu si passionnant de la politique pour ne laisser place qu’un vide existentiel où se côtoient des chasseurs de primes, des médiocres et des personnes en quête d’audience populaire. Dans les partis politiques naguère lieu d’enseignement et de formation des responsables à travers les écoles de parti, le népotisme, le copinage, la médiocrité, le lobbying et la manipulation font lois, au détriment du leadership, de l’apprentissage et de l’excellence qui faisaient miroiter dans les formations politiques.
En dépit donc de tout ce qu’on pouvait reprocher aux socialistes dans leur gestion de 40 années, ils ont réussi à construire un État respecté, à créer des institutions fortes, à former de véritables hommes d’État qui continuent à nous valoir satisfaction et fierté dans tous les secteurs de la haute administration nationale et internationale.
Assane Sène Responsable APR Ngoundiane