Depuis l’installation du gouverneur de Thiès, ce mardi 27 août 2024, je remue, je revisite mes souvenirs. Je cherche un événement qui s’apparente à son déroulement. Mais je n’ai pas trouvé. Bien entendu, rien à dire dans le fond, car il s’agit d’une cérémonie de passation de commandement. Par contre, dans la forme il y’a des leçons à retenir. Voilà pourquoi nous en parlons. D’autres raisons qui m’ont poussé à retremper ma plume dans l’encrier seront évoquées plus tard.
Mais d’emblée, nous pouvons relever que de par notre petite expérience, nous n’avons jamais assisté à une cérémonie d’installation d’un gouverneur, aussi dense qu’enrichissante. Certes, elle est marquée par la sobriété, car il n’a été constaté ni de tam-tams, ni de folklore, encore moins ces envolées aux allures de panégyrique. Ce brouhaha et ces grosses disputes de légitimité autour du parloir, qui souvent, indisposaient, ont été anéantis. Au grand bonheur de ceux qui étaient venus écouter ou apprendre le sens d’un tel cérémonial. Les discours étaient constamment entrecoupés du fait de ces envolées dithyrambiques. Ainsi, le préposé au micro central a bien tenu son rôle.
La cérémonie pouvait alors démarrer. L’honneur revenait au maire de la ville de Thiès qui accueillait l’événement. S’adressant à l’assistance Dr Babacar Diop a dit : «Un gouverneur s’en va, un gouverneur arrive avant de souligner la vulnérabilité de nos institutions ou les hommes passent tandis que le Sénégal et Thiès demeurent. Au gouverneur sortant Mamadou Oumar Baldé il a rendu un vibrant hommage et loué le travail remarquable qu’il a abattu en temps relativement court. «Vous avez rendu de grands et distingués services à notre belle région. Merci pour l’amour que vous portez à Thiès. Pour servir Thiès il faut d’abord aimer Thiès. En ce sens, vous avez montré un amour profond pour notre région et elle vous le rend bien.» S’adressant au nouveau gouverneur. Le Maire de Thiès a déclaré ceci : «Le commandement territorial est un corps de services publics. Il incarne même l’essence du service public. S’inspirant
de la nouvelle vision politique du Président de la République, nous devons amorcer une nouvelle culture de commandement, pour être plus proche des populations et des aspirations profondément démocratiques de notre nouvel état. Le commandement par obéissance, nécessite de l’humilité, de la proximité et du sens de l’autre. Banni le commandement en dominant et en exerçant une violence gratuite chez les populations».
Après ce discours aux allures d’un cours magistral sur le commandement territorial, le maire Dr Babacar Diop a ouvert les portes de la cité du Rail au gouverneur Saer Ndao afin de l’accompagner dans sa nouvelle et noble mission. Lui succédant au micro, monsieur Ibrahima Ndoye a délivré le message du Président du Conseil Département qu’il représentait. Il a d’emblée réaffirmé la volonté des élus locaux à raffermir des relations entre les collectivités territoriales et les autorités déconcentrées. L’occasion faisant le larron, le mot n’est pas interdit dans ces colonnes, il a plaidé la cause des collectivités territoriales qui souffrent du manque criant de moyens, qui devraient accompagner la décentralisation. Face à cette situation difficile, il a sollicité du Ministre de l’Intérieur un plaidoyer auprès du Président de la République Bassirou Diomaye Diakhar Faye. Le message des collectivités territoriales est le suivant : «Sensibiliser le Président de la République sur l’urgence de procéder à l’évaluation de la mise en œuvre de l’acte III décentralisation».
La territorialisation nécessite des moyens plus consistants. C’est cela qui va permettre aux collectivités territoriales de porter de nouveaux habits de lumière. Ce sera le bout du tunnel qui ouvrira un nouvel élan salvateur a renchéri le représentant du conseil départemental de Thiès. Arrive le discours tant attendu du Gouverneur sortant Mamadou Oumar Baldé. Dans une démarche ferme qui le caractérise, enfilant sa belle tenue sans doute ou peut être la dernière dans le commandement territorial, le désormais ancien gouverneur de la région lançant une bombe : «Au moment où je quitte définitivement le commandement territorial, je tire un chapeau à tous ces gouverneurs, à tous ces préfets et à tous ces sous-préfets et leurs adjoints. Ces adieux à un métier que j’ai aimé et servi, sont l’occasion pour moi de dire que j’ai été un soldat pour les circonscriptions administratives que j’ai eues à diriger». On le constate non sans être surpris, après vingt ans d’exercice d’un métier exaltant mais difficile, le Gouverneur Mamadou Oumar Baldé le quitte
définitivement pour des raisons qu’il n’a pas dévoilées au cours de son discours héroïque du 27 Août 2024. Apparemment personne ne s’attendait à une telle annonce si l’on en juge par son parcours que lui-même a dévoilé.
«Dans le déroulé du parcours du commandement, il y’ a un début et évidement une fin. Ce parcours qui s’achève aujourd’hui, a débuté 15 avril 2004. Dieu soit loué. C’est l’occasion que je saisis, pour remercier profondément son Excellence Maitre Abdoulaye Wade pour la période 2004-2012, son Excellence Macky Sall pour la période 2012-2024, son Excellence Bassirou Diomaye Faye pour l’année 2024. Du nord à l’est, en passant par le centre du pays, nous nous sommes évertués à servir nos concitoyens, en ayant comme seule boussole l’intérêt général». La cérémonie qui s’est déroulée sous la présidence du Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité Publique s’est poursuivie à la suite de ce discours emblématique. Le général de corps d’armée, Jean Baptiste Tine Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité Publique a installé officiellement dans ses fonctions de gouverneur de la région de Thiès Monsieur Saer Ndao, non sans l’inviter à travailler tout de suite et maintenant, enfin de relever les défis suivants. «La lutte contre l’insécurité, la lutte contre les inondations, la poursuite et l’accompagnement des grands projets de l’état dans la région, l’organisation des grands événements religieux, la réduction des accidents de la route, la gestion pacifique des nombreux conflits fonciers, la promotion des secteurs de production comme l’agriculture, la pêche, les mines, l’industrie, le tourisme». La liste n’est pas exhaustive.
Le Général, Ministre de l’Intérieur a par la suite, clairement signifié au nouveau gouverneur les attentes des plus hautes autorités et des populations tout en disant qu’il sera jugé par les réponses qu’il apportera aux nombreuses préoccupations de l’heure. Naturellement, il lui a assuré de son soutien total, ainsi de celui de hautes autorités. Avant de vous proposer un extrait de la réponse du gouverneur Saer Ndao face à ces défis et enjeux, jetons un coup d’œil sur son long et riche parcours. Il est sorti de l’ENAM en 2003 section administration générale puis il intégrera en 2005, la grande famille des caciques, c’est à dire la direction générale de l’administration des affaires territoriales pour un réchauffement comme me disait souvent feu Gorgui Alioune Diouf, paix à son âme. Deux années plus tard, il est nommé adjoint du gouverneur de la région de Tambacounda chargé du développement puis préfet de Goudiry, Diourbel, Mbour avant d’être nommé gouverneur de Kédougou, Kolda et aujourd’hui Thiès.
Muni d’une expérience de près de vingt dans les cimes de l’administration territoriale, assurément, le gouverneur Saer Ndao ne manque pas d’arguments, ni d’atouts, pour rassurer le Ministre de l’Intérieur et les populations de Thiès. La haute teneur de l’allocution qu’il a prononcée devant le Ministre, les autorités locales, coutumières, religieuses et un parterre d’invités, est plus que convaincante. «Monsieur le Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité Publique, vous venez de m’installer dans mes nouvelles fonctions de gouverneur de la région de Thiès. Un défi s’impose à moi, car tout devient prioritaire dans cette belle région cosmopolite, où se côtoient plusieurs diversités culturelles. Une région fortement industrielle et agricole, qui est par essence le carrefour du choc des ambitions. La préservation des ressources naturelles, la gestion foncière, recommandent de notre part, une posture de veille et d’anticipation, pour une meilleure prise en charge de l’action publique».
A ce stade de son adresse, il s’est engagé avant d’engager les autorités administratives, préfets, sous-préfets, services régionaux, partenaires au développement, les élus territoriaux, à conjuguer tous les efforts, pour qu’ensemble, ils puissent lever les obstacles et consolider les acquis, afin de mettre à la disposition des usagers, une administration de qualité, apte à résoudre les nombreux besoins des populations. Ce travail herculéen qui l’attend, repose sur des principes clairement définis et qu’il ne cesse d’incarner, c’est-à-dire «le courage dans la prise de décision, la franchise dans le management des hommes, la bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques mais surtout, la promptitude dans la réaction face aux responsabilités de service public». Il a annoncé le retour des comités régionaux de développement qu’il souhaite participatif et intégrateur. La mission est complexe a-t-il reconnu, si l’on en juge par les multiples enjeux qui caractérisent la région de Thiès mais pas impossible renchérit-il. A l’arrivée, ce fut une belle cérémonie, avec des discours au français bien fouillé et bien entretenu (Gloire à Senghor, qu’il repose en paix) hé oui, le bon français a été prononcé avec de belles sonorités philosophiques. Ce fut agréable à écouter. Pour dire que ces rencontres de haut niveau, doivent toujours rester dans la solennité. Celle de la République.
L’installation d’un gouverneur, qui de surcroît est le premier responsable de l’administration de la région, est assurément un événement à extirper de toute banalisation. C’est un moment solennel, car il s’agit de présenter un grand commis de l’Etat aux populations, aux préfets et aux sous-préfets, aux élus locaux partenaires de raison, aux chefs religieux, aux jeunes et aux femmes à la société civile, aux partenaires sociaux, aux chefs d’entreprises, bref à toutes celles et à tous ceux qui peuvent concourir au développement de sa circonscription. Le cérémonial du mardi 27 Août 2024, a tant bien que mal respecté la solennité de l’événement même si, quelque part, on n’a pas pu se retenir d’applaudir. Mais bref, c’est mieux que rien. Et c’est tant mieux si on a réussi à maîtriser cette envie folle de chanter ou de tarir d’éloges. Interdits de parole ou d’envolées, ces éminents communicateurs dépositaires de la tradition orale, les proches, les invités tout comme autorités, se sont contentés d’écouter le roi du mbalax que nous imposait le préposer au son. Là aussi, c’était pas mal et on écoutait tranquillement sans bouger si j’ose dire. Chapeau au protocole pour sa rigueur. Le gouverneur Mamadou Oumar Baldé, installé à la tête de l’exécutif régional en novembre 2023, est en fin de mission dans la capitale du rail qu’il chérit tant. Son ami Saer Ndao prend les commandes. De tout ce qui précède, voici la quintessence de ce qui a retenu notre attention en ce jour mémorable du 27 Août 2024. Et c’est pour l’essentiel, le sens de ce billet qui marque le retour progressif de son auteur, suite à une forte demande, mais pas sur la pression de l’administrateur de votre site de référence. Si nous en parlons, c’est parce que cet événement est intervenu dans un contexte marqué par l’ouverture du Ministère de l’Intérieur vers nos concitoyens et la mise en forme d’une administration de proximité. Dans ce sillage, il y’a une réelle convergence de vue, entre les autorités déconcentrées et décentralisées. Le Maire de la ville de Thiès Dr Babacar Diop, l’a confirmé dans un discours d’une forte teneur.
C’est le Sénégal et la République qui méritent d’être servis avec foi et abnégation, a-t-il soutenu. Quant à Ibrahima Ndoye, qui n’a rien perdu de son élégance, il a souligné que la mission est honorable. Très parlant quand on comprend ce que signifient les mots et les expressions. Et le talentueux journaliste qui a rédigé quelques belles pages du journal le témoin, de nous prouver encore une fois son humilité, en déclarant devant qui veut l’entendre, qu’il n’a pas les talents de son prédécesseur au micro, le Maire de la ville Dr Babacar Diop, professeur d’université grand intellectuel.
Nous, nous disons à notre frère Ibrahima, que nous n’avons pas ses dons. Du haut des tribunes comme dans les alentours de la mythique gouvernance de Thiès, l’hymne national a retenti pour accueillir un serviteur de l’Etat et des populations. Ainsi, de cette cérémonie de passation de commandement au plus haut niveau de l’administration régionale, nous retenons que la rupture est bien actée. Nous fermons ainsi les rideaux sur ces retrouvailles, qui ont consacré le début d’un nouveau sacerdoce en ce 27 Août 2024 et la fin d’un parcours vieux de vingt ans. Le général Ministre de l’Intérieur Jean Baptiste Tine, a fini de formuler des recommandations et directives au nouveau gouverneur, en relation avec la nouvelle vision des plus hautes autorités du pays, en relation avec les défis et enjeux de la région de Thiès. J’en parle, parce que je fus séduit par les discours héroïques et tenaces, qui ont été prononcés. J’en parle, parce que la solennité de l’événement n’a pas souffert d’anicroche. Et puis, personne n’a baragouiné. Vivement, la nouvelle approche du commandement territorial, qui est désormais basée sur une administration de proximité et d’ouverture.
Ancien chef de département à la RTS.