La création d’une nouvelle société ferroviaire en remplacement de Dakar Bamako Ferroviaire (DBF) suscite certes espoir pour un développement harmonieux du pays, mais elle soulève aussi une inquiétude légitime de la part des anciens employés de DBF. Le premier adjoint du Syndicat unique des travailleurs du rail (Sutrail) exulte. « Nous avons appris la nouvelle, comme tout un chacun dans le pays, depuis vendredi dernier, que le projet de loi portant création de la société les ‘’Chemins de Fer du Sénégal’’ (CFS) a été finalement voté à l’Assemblée nationale.
Tous les cheminots ont applaudi. C’est la création de cette société qui entre dans le cadre de la politique de réhabilitation du chemin de fer, dans la lutte contre l’insécurité routière et contre la dégradation préventive des routes du Sénégal. Cette société a pour mission de gérer le patrimoine ferroviaire du Sénégal, excepté le TER», déclare sous un brin d’optimisme, Mademba Kamara, chef de gare de métier. «Nous saluons la volonté de l’Etat de vouloir accélérer le processus car nous avons toujours été en phase pour la réhabilitation du chemin de fer et la relance des activités du transport ferroviaire sur l’axe Dakar-Bamako.», renchérit le porte-parole du Collectif des délégués de DBF Babacar Gaye.
Toutefois, ils émettent de réserves. « En tant que représentant du personnel, nous avons des inquiétudes sur la part et la place des travailleurs dans la société. Comment le patrimoine sera réparti ? Nous sommes à l’état d’attente sur le schéma institutionnel dessiné entre le Mali et le Sénégal. Car dans le schéma institutionnel, nos deux Etats avaient prévu la création de deux sociétés de patrimoine. Au Mali, on a créé SOMAFER depuis plus d’un an. Au Sénégal, on a créé CFS. Donc, il reste un repreneur», souligne Mademba Camara. « Certainement, les Etats vont faire un appel d’offres pour un repreneur. La Banque Mondiale sera maîtresse d’œuvre pour la réalisation de la ligne ferroviaire Dakar-Bamako. Mais on ne sait pas pour combien d’années et la durée d’exécution. Alors, nous sommes vraiment inquiets puisque nous ne sommes pas encore sortis du tunnel. On nous dit qu’il y a une étude en cours sur le coût de la réhabilitation du chemin de fer Dakar-Bamako. Mais on attend de voir pour y croire» martèle le syndicaliste.
« Nous voulons au préalable des concertations pour ne pas léser les travailleurs. Cependant, nous réitérons notre souci de voir les autorités nous associer au redéploiement annoncé. Nous souhaiterions être consultés avant toute décision afin que les acquis des travailleurs soient conservés en toute intégrité. Nous attirons l’attention des autorités sur un certain nombre de doléances dont la question de l’avancement des travailleurs qui doit se faire tous les deux ans mais bloqué depuis plus de dix ans, c’est-à-dire depuis le temps de Transrail, le reversement des cotisations sociales du personnel au niveau de l’Ipres, le règlement de la question des retraités et du régime cadre», souligne par ailleurs Babacar Gaye.
« L’avenir sort du passé. Et l’expérience de Transrail passant par DBF avec les problèmes que nous avions eu à rencontrer nous a poussés à nous inquiéter sur notre devenir. Aucun train ne roule depuis 2018. DBF qui avait hérité de l’actif du concessionnaire canadien avait annoncé la location de locomotives sud-africaines. La structure n’a jamais réussi à mobiliser 20 milliards qu’il réclamait auprès de nos deux Etats (Sénégal et Mali) pour faire rouler les trains. En créant la société CFS, le Sénégal valide ainsi la Banque Mondiale. Nous sommes sur le statu quo. Tout est ambiguë», indiquent les syndicalistes qui réclament une rencontre avec l’Etat
L’AS